Alors le 16 mars 2020, les français étaient soumis au premier confinement, nombreux d’entre eux ont fait le choix de se reconvertir professionnellement. 3 ans plus tard, ils semblent ne pas regretter leur choix, au contraire. C’est en tout cas ce qui ressort d’une enquête Ipsos, dans laquelle la grande majorité des français ayant opté pour une reconversion professionnelle lors du confinement, avoue ne pas regretter sa décision.
Une reconversion liée aux valeurs
Mélanie fait partie de cette catégorie de français qui ont changé d’orientation professionnelle lors du confinement. En effet, alors qu’elle est Directrice de la communication d’Instagram France, elle va tout plaquer. « J’avais un super job, j’étais très heureuse, mais à partir du confinement, les gens se sont réfugiés sur les réseaux sociaux. Et contrairement à la moitié de mes potes qui faisaient de la poterie et du pain, j’ai travaillé dix fois plus sans les côtés chouettes : finis les événements, les rencontres, la vie sociale très active. J’ai très mal vécu cet isolement et j’ai eu le sentiment d’être arrivée au bout, d’être à un tournant. J’avais 42 ans, je me suis dit : « c’est maintenant ou jamais ». Et avec des grands-pères maçon et ébéniste, et des parents dans l’ameublement et la gestion de chantiers, je voulais faire quelque chose qui rassemble ces métiers : architecte d’intérieur », déclare-t-elle.
Elle n’est pas la seule dans ce cas, car nombreux sont ceux qui ont profité de cette période pour se remettre en question. C’est le cas de Claire, 28 ans et ingénieure dans une entreprise de distribution de textile : « usine de la fast fashion où des gens très peu payés fabriquent nos vêtements qui polluent. J’y pensais avant, mais là, j’ai vraiment réfléchi aux enjeux environnementaux et sociaux liés à nos modes de consommation, ce qui a nourri une envie profonde de redonner du sens à mon travail. Et de créer une entreprise en accord avec mes convictions ».
Pour Sophie Caruelle, consultante en pratiques RH, spécialiste des mutations du monde du travail et autrice de l’ouvrage Pour quel monde travailler ? (éd. L’Harmattan), cette réflexion va dans le sens de « la prise de conscience d’une certaine forme d’aliénation du travail. Le confinement a montré qu’il était possible de travailler autrement. Beaucoup se sont dit « je peux créer mon emploi en respectant mieux mes aspirations ». On observe ainsi un rebond de la création d’autoentreprises, principalement chez les moins de 30 ans ».
Certains comme Frédéric, 47 ans, vont faire un virage à 180 degrés, un changement radical : « J’étais dans le conseil financier, pour aider des gens gagnant déjà beaucoup d’argent à en gagner encore plus. Il est devenu de plus en plus difficile de trouver de l’utilité à ce que je faisais, d’autant que le climat dans mon entreprise était stressant et pas particulièrement bienveillant, confie-t-il. Quand le confinement a exacerbé la précarité de certaines populations, ce sentiment que je n’aidais pas les personnes qui en avaient le plus besoin est devenu trop lourd. Je ne pouvais plus continuer ». Là encore, « le confinement a révélé la crise du travail qui était sous-jacente : les risques psychosociaux, le mal-être et le stress font gronder la population salariale depuis un moment », explique Sophie Caruelle.